Le Modèle de Transformation Lean
Il est d’abord important de noter que le lean n’est pas réservé aux sociétés exerçant des activités de production ou de fabrication. Le lean est une vision du monde, applicable à presque tous les secteurs.
Après l’introduction du kanban dans le travail intellectuel, la façon de pensée lean a connu un véritable essor dans les équipes logiciel, de développement de produit, de marketing, des opérations et bien d’autres. Le lean a été lancé chez Toyota, mais a dépassé les portes de l’entreprise japonaise, ce qui rend le modèle de transformation lean pertinent pour tous.
John Shook, PDG du LEI, l’un des premiers individus à avoir apporter le lean des usines de Toyota vers le monde occidental, décrit le modèle comme une maison bâtie autour de cinq éléments fondamentaux :
- L’approche situationnelle
- L’amélioration du processus
- Le développement des capacités
- Le leadership responsable
- Idées, mentalité et hypothèses de base
La maison du cadre de transformation lean
Crédit image : Lean Enterprise Institute
Si cela vous semble trop abstrait, vous n’êtes pas seul. Le jargon de la gestion peut parfois être agaçant, mais M. Shook va plus loin et précise cinq questions qui sont plus naturelles à comprendre. Chacune de ces questions correspond à l’une des dimensions du cadre lean susmentionnées :
- Quel est le but du changement ? Quel problème essayons-nous de résoudre ? (Approche situationnelle)
- Comment améliorons-nous le travail actuel ? (Amélioration du processus)
- Comment renforçons-nous la capacité ? (Développement des capacités)
- Quels comportements de leadership et systèmes de gestion sont requis pour accompagner cette nouvelle façon de travailler ? (Leadership responsable, système de gestion)
- Quelles idées, mentalités ou hypothèses de base composent la culture existante et justifient cette transformation ?
L’idée est aussi simple qu’elle est profonde. Si vous pouvez répondre à ces questions, alors vous pourriez réussir votre mise en œuvre du cadre de transformation lean au sein de votre société. Bien sûr, c’est plus complexe que cela, mais si vous n'arrivez pas à répondre à ne serait-ce qu’une de ces questions, n’essayez pas de modifier votre organisation.
En vous lançant de manière prématurée sans la préparation nécessaire dans un programme de transformation pour intégrer le modèle lean dans votre entreprise, vous courrez le risque de sous-investir dans certaines de ses dimensions. Cela déséquilibrera votre programme et vous mènera à un échec.
Répondre aux Questions du Modèle de Transformation Lean
La toute première étape du programme de transformation est la plus difficile. Lorsque vous êtes face à quelque chose d’aussi vaste et ambitieux, il est généralement très difficile de savoir par où commencer. Dans le reste de cet article, nous vous fournirons des conseils pratiques sur la façon d’aborder les questions importantes mentionnées dans la section précédente.
1. Quel problème essayons-nous de résoudre ?
La transformation lean prend généralement la forme d’un changement descendant, c’est-à-dire qu’elle est initiée par la direction ou les cadres supérieurs d’une société. Ceci étant dit, les problèmes visés sont ceux auxquels sont confrontés les cadres supérieurs :
- Améliorer la productivité
- Réduire les temps de livraison
- Éliminer les retards de projet
- Augmenter le profit
- Renforcer la satisfaction client
- Améliorer la qualité
- Gérer la complexité
Quels que soient les vrais problèmes, ils doivent être documentés et présentés à toutes les parties concernées durant la mise en œuvre. Pour garantir que tous les employés et cadres connaissent les véritables objectifs de la transformation, consignez toutes les informations dans un document évolutif ou une page wiki.
Avoir trop d’objectifs et de problèmes à résoudre dans le même temps est un autre élément auquel il convient de faire attention. Moins il y en a, mieux c’est. Il est bien plus facile de faire passer le message si vous cherchez seulement à améliorer la qualité.
Si vous voulez simultanément améliorer la qualité, réduire les temps de livraison, augmenter le profit et rendre vos clients heureux. Cela ne fonctionnera pas.
L’identité des propriétaires de la transformation lean doit être très explicite. Vous devrez évidemment avoir l’approbation du conseil, mais parmi les membres de ce dernier qui est le parrain de ce processus ? S’agit-il de vous ? De votre supérieur ? Qui va « gagner davantage de temps » lorsque les choses ne se dérouleront pas comme prévu (ce sera le cas) ? Cet individu est-il le propriétaire des problèmes que vous essayez de résoudre ? Se soucie-t-il vraiment de voir ce défi particulier traité ? Si personne n’est prêt à défendre la transformation lean, les chances de réussite déclinent de façon considérable.
Si nous devions tout résumer en un seul mot, ce serait la transparence. Plus les individus disposent d’informations, plus leur soutien sera important. Soyez aussi transparent que possible concernant les objectifs et invitez tout le monde à participer au mieux de leur capacité.
Vous pourriez être surpris par l’apport de certains individus. Et si certains défis pouvaient être traités de manière beaucoup plus simple, mais que personne n’y avait pensé ? C’est peu probable, mais possible.
Dernier point, mais non le moindre, ne voyez pas cela comme une étape ponctuelle. C’est une dimension évolutive du cadre de transformation lean et elle doit être contrôlée régulièrement. Vous devez constamment vous demander si cela vaut le coup de résoudre le problème que vous avez commencé à traiter. Vous devez être souple et capable de changer de cap, si la situation l’exige.
2. Comment améliorons-nous le travail actuel ?
En répondant à cette question vous obtiendrez la liste des améliorations de processus à effectuer. Attention, cette liste ne doit pas être considérée comme un cahier des charges indiquant à tous comment améliorer leur processus, mais plutôt comme un schéma général des processus qui doivent être améliorés.
En d’autres termes, les améliorations concrètes du processus à mettre en place doivent appuyer l’objectif global. Améliorer des éléments simplement pour les améliorer n’est pas ce que vous devez rechercher.
Les critères de succès doivent également être listés, car les individus effectuant vraiment le travail doivent savoir ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas.
Comme indiqué dans l’image présentée au début de l’article, l’amélioration du processus est l’un des piliers du modèle de transformation lean.
Il soutient le toit, qui représente le problème à résoudre. En d’autres termes, les améliorations concrètes du processus à mettre en place doivent appuyer l’objectif global. Améliorer des éléments simplement pour les améliorer n’est pas ce que vous devez rechercher.
L’essence de l’amélioration du processus est de faire de petites expérimentations, d’évaluer les résultats et de s’adapter en fonction de ceux-ci. Il s’agit donc avant tout d’une roue de Deming, ou méthode PDCA : Planifier – Faire – Vérifier – Agir (« Plan, Do, Check, Act »).
Cela va de pair avec de nombreux éléments de la théorie du Lean start up. Concevoir un MVP (Minimum Viable Product ou produit minimum viable) d’une amélioration de processus, le valider avec de véritables consommateurs (ou collègues) et, s’il est réussi, l’étendre à plus grande échelle.
C’est probablement la chose la plus difficile à réaliser, transformer la mentalité de tous en état d’esprit tourné vers l’expérimentation. Expérimenter requiert de plus hauts niveaux d’énergie et les individus ne le feront pas naturellement. Cela nécessite un véritable changement de culture, mais nous en reparlerons plus tard.
Cela étant dit, à ce stade, méfiez-vous des suggestions vous invitant à adopter un cadre plutôt qu’un autre. De nombreuses sociétés de conseil seront ravies de vous vendre d’onéreuses formations afin de vous présenter les méthodes SAFe, LeSS, DAD, Nexus et bien d’autres.
Ne faites pas cela, sauf si vous êtes prêt à accepter le fait que votre société ne sera pas lean de sitôt et si vous êtes disposé à prendre un raccourci, juste pour obtenir une amélioration.
Si vous faites partie des rares personnes qui réalisent que les raccourcis ne fonctionnent jamais, vous feriez mieux de commencer petit et depuis votre situation. C’est là que les outils du lean management s’avéreront bien pratiques. Le kanban, le projet A3, la méthode PDCA, les 5 pourquoi, le poka-yoke, la méthode Hoshin vous permettront tous de vous rapprocher de l’état futur désiré.
Une fois qu’une part significative de la société a maitrisé plusieurs outils du lean management, il est temps de voir plus grand. Étendre les principes et les pratiques du lean est difficile et requiert un dévouement absolu. Le Portfolio Kanban est un excellent outil pour vous aider à étendre le lean au sein de la société.
3. Comment renforçons-nous la capacité ?
Renforcer la capacité est une autre façon de dire « développer les individus ». Tout le travail est effectué par des individus et il faut le garder à l’esprit. Le second pilier du cadre lean est le développement des individus, car nous ne pourrons pas améliorer notre organisation si nous n’aidons pas ses membres à s’améliorer.
Plus important encore, ce sont les individus qui doivent effectuer de nombreuses expérimentations et améliorer constamment les processus.
Il y a un adage très intéressant : « Si vous faites ce que vous avez toujours fait, vous obtiendrez ce que vous avez toujours obtenu ». C’est particulièrement vrai concernant le lean. Si votre personnel n’a pas été formé à penser lean, peu importe ce que vous tentez, votre société ne deviendra pas lean toute seule.
Il arrive trop fréquemment que les employés profitent de toute la formation nécessaire, tandis que les cadres non. Cela génère un vide en matière de communication et les résultats ne sont pas optimaux.
Agissez autrement, commencez le processus de formation avec l’encadrement avant de vous tourner vers les employés. En réalité, on obtient de meilleurs résultats quand tous les responsables forment leur propre personnel.
C’est comme ça que Toyota a procédé et continue de le faire. Ce sont les responsables qui forment leur personnel et non une société tierce qui n’a pas de réelle expérience avec l’activité.
Cela créé une relation spéciale maître-apprenti entre le responsable et l’employé et favorise l’engagement à long terme des membres de la société.
Afin d’aborder cette dimension de la transformation lean, faites du développement des individus une question stratégique véritablement examinée par le conseil.
Aucune société ne vous dira que le développement des individus n’est pas une priorité, mais peu le mettent sur la liste de leurs initiatives clés. Plus vous générerez, partagerez et réutiliserez de connaissances, plus votre société se développera rapidement.
4. Quels comportements de leadership et systèmes de gestion sont requis pour accompagner cette nouvelle façon de travailler ?
Il ne fait aucun doute que le leadership joue un rôle central dans la mise en œuvre d’une transformation lean. C’est pourquoi il occupe l’intérieur de la maison de la transformation lean (image 1). Il interagit avec l’intégralité du système, afin de le rendre meilleur et, en retour, le système le protège contre le froid.
La gestion d’une organisation est le ciment qui permet à l’ensemble de fonctionner. Mais il y a une chose qu’on ne soulignera jamais assez :
Au sein d’une société lean, tout le monde devrait être un meneur.
Comme susmentionné, afin d’être lean, une société doit favoriser l’expérimentation et l’adaptation rapide aux facteurs environnementaux.
Cela ne peut se produire de manière efficace dans des situations où le leadership prédominant est de style autoritaire.
Dans le monde réel, les héros solitaires qui sauvent le monde n’existent pas. C’est la cohérence et la persévérance de tous qui comptent. Si seuls quelques individus tirent sur la corde, la concurrence l’emporte.
Si tout le monde doit être un meneur, que faut-il pour en devenir un ? C’est une simple question de formation. Formez-vous aussi rapidement que possible et les autres suivront. Donner l’exemple est la caractéristique la plus importante d’un meneur.
Dans une organisation lean, les meneurs doivent être guidés par des données. Ils ne doivent pas être victimes de leur ego et accepter l’échec. S’ils imposent leur opinion aux autres, sans données pour appuyer leur choix, ils ne s’intégreront pas dans une culture en constante évolution d’amélioration continue.
Concernant les meneurs officiels, ceux que nous appelons des responsables ou des cadres, leur meilleure aptitude devrait être de renforcer la capacité. Comme le dit notre PDG de Kanbanize : « Mon objectif en tant que meneur est de devenir inutile ».
Comme l’amélioration continue est un voyage et non une destination, devenir inutile au sein d’une société lean est presque impossible et notre PDG le sait. Après tout, plus un penseur lean est expérimenté, plus il est capable d’encadrer et de guider la prochaine génération.
Mais le message caché est qu’un meneur devrait aider ses équipes à devenir plus indépendantes et auto-organisées. Un vrai meneur lean devrait former les individus à penser de manière analytique et à critiquer les opinions.
Il devrait également affirmer que les vœux pieux sont de purs gaspillages et que régir une organisation n’est possible qu’à l’aide d’un suivi scrupuleux et une gestion active des indicateurs clés de performance (KPI).
Avant toute chose, au sein d’une organisation lean, le meneur doit être une boussole culturelle. C’est celui que tout le monde devrait admirer et essayer de copier. Le vrai meneur créé la culture de la société et a le courage de la modifier, si nécessaire.
5. Quelles idées et mentalités justifient cette transformation ?
En parlant de culture, nous arrivons à la partie la plus importante et cruciale du modèle de transformation lean. Elle est formulée avec les termes « idées », « mentalité » et « ensemble d’hypothèses », mais tout ceci ne signifie qu’une chose : culture. La culture est l’atout le plus précieux d’une société.
Ce n’est pas un hasard si Louis V. Gerstner, Jr., ancien PDG d’IBM a dit :
« Avant que j’arrive chez IBM, je vous aurais probablement dit que la culture était l’un des éléments importants de la composition et la réussite de n’importe quelle société, avec la vision, la stratégie, le marketing, les finances, etc. J’ai réalisé, quand j’étais chez IBM, que la culture n’est pas qu’un simple aspect du jeu, c’est le jeu. Au final, une organisation n’est rien de plus que la capacité collective de ses membres à créer de la valeur. »
Si une société tente une transformation lean sans être prête à changer de culture, cela ne sert à rien d’essayer. L’échec sera tôt ou tard au rendez-vous. C’est pourquoi une telle initiative DOIT commencer par une évaluation franche de la culture existante et tous les défis liés à celle-ci.
Une fois cette évaluation réalisée, l’état futur désiré doit être identifié. Un moyen pratique d’effectuer ces changements est ce que nous appelons les « valeurs de la société ». Les valeurs du groupe représentent la culture de la société et les modifier devrait à terme déboucher sur un changement complet de la culture.
Bien entendu, cela ne se produira pas en accrochant de nouvelles affiches sur les murs ou à l’aide d’une nouvelle présentation PowerPoint. La modification des valeurs doit commencer au sein de la direction et se concrétiser par un véritable changement de comportement.
Si les meneurs adoptent durablement de nouveaux comportements, le reste des employés suivront. Cela peut prendre un an, voire plus, mais ils suivront.
Une fois que la vision est mise en place, faites en sorte que les cadres supérieurs s’engagent en ce sens. Il n’y a rien de plus démotivant que de faire des tonnes d’efforts supplémentaires et de se faire interrompre par les cadres.
S’ils ne s’engagent pas et s’ils ne peuvent être des courroies de transmission de la culture que la société souhaite adopter, le voyage restera possible, mais rude.
Bien commencer
Chaque long voyage débute avec une première étape. Vous venez de commencer le vôtre, félicitations ! Pour vous préparer davantage, continuez la lecture sur la feuille de route de la transformation Lean et les étapes détaillées.
Nous proposons la plateforme logicielle
la plus flexible pour l'agilité des entreprises axée sur les résultats.